mardi 11 mai 2010

Breathless

Vous avez dit "coup de poing" ?

Titre original : Ddongpari
Ecrit & réalisé par : Ik-june Yang
Avec : Ik-june Yang, Kkobbi Kim, Hwan Lee
Durée : 130 min

Sang-hoon est un voyou excessivement violent qui met toute sa rage dans son "métier" de recouvreur de dettes pour le compte de son ami Man-sik. Toute sa vie est jalonnée de coups de poings et d'insultes, à tel point qu'il ne sait plus exprimer autrement ses sentiments.

Un jour il croise Yeon-hee, une lycéenne dont l'histoire familiale ressemble étrangement à la sienne. Ensemble, ils tentent de s'échapper d'un monde rongé par la haine et la rancune et de recoller les morceaux de leurs vies éclatées.






Le regard fuyant et le gnon facile, Sang-hoon est une boule de rage à peine contenue qui pense, respire, vit dans et par la violence. Il ne dit pas bonjour ; il donne une tape sur la tête et il injurie plus facilement qu'il ne sourit. Mais il n'est pas le seul à être ainsi : cette descente dans la misère sociale sud-coréenne révèle un monde régi par la violence quotidienne. Cela ne s'arrête presque jamais, c'est éprouvant, fatiguant ; on n'a pas le temps de respirer.

Les rares moments d'affection sont autant d'accalmies inespérées dans un ciel perpétuellement orageux. Caméra au poing, nerveuse mais pas trop, Ik-june Sang capte le ton juste, l'instant de sincérité dans un scénario impitoyable et tranchant comme une lame de rasoir, qui démolit la figure paternelle et déconstruit la cellule familiale avec une sensibilité à fleur de peau, étouffante.

Au coeur du drame, Ik-june Sang resplendit, lui qui a écrit, réalisé, produit, monté et interprété son film en marge de l'industrie sud-coréenne. Vingt-trois jours seulement pour écrire le scénario, a-t-il déclaré. On le croit volontiers ; il faut s'être lancé à corps perdu dans l'écriture pour avoir mis au monde ce récit viscéral, qui frappe par son intelligence et son humanité. Sang-hoon, cet anti-héros, ce bourreau, ce malfrat sans scrupule ni remords, est la personnalité la plus touchante de ce début d'année au cinéma.

Film social certes, mais jamais complaisant ni démagogue. Les personnages sont aussi cohérents qu'une feuille de calcul et, au détour d'une insulte ou d'un coup de pied (souvent les deux à la fois), nous jettent leur humanité à la figure avec la douceur qui les caractérise. Car dans cet univers inhumain, ils sont tous des êtres humains, avec leurs failles, leur passé, leur avenir.

Qu'importe que la haine balaie tout sur son passage comme une marée furieuse ; la peur de la mort, l'appel du sang familial sont des rocs au milieu de la tempête, contre lesquels le spectateur est projeté en même temps que les personnages, dans une vague de tendresse et d'authenticité qui vous écrase et vous bouleverse. Entre deux baffes, on pleure. Entre deux pleurs, on admire. Et dire que c'est un premier long-métrage.


Sentence : 5/5

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